« Une crise sans précédent » . C’est en ces termes que, de passage le 25 décembre 2023 à la Chambre des représentants, le ministre de l’Équipement et de l’Eau, Nizar Baraka, avait qualifié la situation hydrique actuelle au Maroc.
Il faut dire que le Royaume fait face, en cette année agricole 2023/2024, à sa sixième année consécutive de sécheresse. D’octobre à décembre 2023, les précipitations étaient inférieures de 67% en comparaison avec une année jugée normale.
Un état de fait qui affecte notamment le secteur agricole, où, croit le savoir Mohamed Taher Sraïri, professeur de l’enseignement supérieur à l’Institut agronomique et vétérinaire (IAV) Hassan-II, « près de 40% de la population active travaillant dans le secteur » devrait essuyer « une chute brutale des revenus » .
« Lorsqu’on entend que le service d’eau domestique est menacé, il faut bien comprendre que la satisfaction des besoins de l’agriculture est fortement compromise » , a déclaré Mohamed Taher Sraïri au quotidien « Le Matin » , pour un article publié par ce dernier dans son édition du jeudi 28 décembre 2023.
Pour cet expert, le modèle agricole actuel, qui a eu tendance, notamment dans la foulée de l’adoption du Plan Maroc vert (PMV) à partir d’avril 2008, à donner de plus en plus la part belle à l’irrigation – environ 15% des surfaces cultivées -, devrait être revu, de sorte à privilégier davantage l’agriculture pluviale. Il parle, à ce propos, d’un changement de paradigme à effectuer.
Ainsi, l’irrigation ne devrait plus seulement servir que d’appoint, notamment dans les circonstances actuelles, qui commandent de recourrir à une « réserve hydrique stratégique facilement mobilisable » mais dont le Maroc ne dispose tout bonnement pas aussi bien du fait d’ « un niveau de remplissage des barrages très limité » – 23,27%, au mardi 2 janvier 2024 – que de « nappes en très grande partie surexploitées » .
De ce fait, Mohamed Taher Sraïri plaide pour « une approche globale, incluant la sélection variétale adaptée au manque d’eau, la gestion de l’humidité des sols et l’intégration des cultures et de l’élevage selon les principes d’une bio-économie circulaire » .
A noter que dans son « plan de choc » dévoilé le 26 décembre 2023, le ministre de l’Intérieur, Abdelouafi Laftit, avait inclus l’interdiction des cultures aquavores, dont la liste reste encore à déterminer en concertation avec le ministère de l’Agriculture, de la Pêche maritime, du Développement rural et des Eaux et Forêts.