Partenaire de dialogue sectoriel de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) depuis le 4 septembre 2023 et, à ce titre, premier pays arabe et africain à accéder à ce statut, le Maroc a franchi une nouvelle étape dans ses relations avec les pays membres de cette organisation régionale avec la signature d’un mémorandum d’entente avec l’Indonésie.
Paraphé le vendredi 22 décembre 2023 à Rabat par le ministre des Affaires étrangères, Nasser Bourita, et son homologue indonésienne, Retno Marsudi, en visite au Maroc dans le cadre d’une tournée régionale qui l’avait précédemment menée en Algérie et en Tunisie, le mémorandum d’entente vise à établir un partenariat stratégique entre les deux pays. Avec notamment comme objectif, selon ce qu’a rapporté une dépêche de l’agence Maghreb arabe presse (MAP), le partenariat économique, la coopération au développement ou encore la coopération scientifique et technique.
Dans l’intervention qu’il a faite dans la foulée devant les médias, Nasser Bourita a parlé du nouveau partenariat comme d’ « une ambition que nous devons concrétiser, en donnant corps à ce qui a été signé » . À ses yeux, le partenariat « ne doit pas être un simple slogan mais une réalité sur le terrain » . Des propos qu’a également partagés Retno Marsudi, pour qui aucun effort ne devrait être ménagé par le Maroc et l’Indonésie.
Mais comment tout cela peut-il se traduire, concrètement ?
Pour répondre à cette question, il faut sans doute partir des déclarations données, à l’occasion de la signature du mémorandum d’entente, par Nasser Bourita et Retno Marsudi.
En fait, le constat implicite que les deux responsables semblent partager, c’est celui de relations qui restent bien en-deçà du niveau où elles devraient normalement être.
Certes, une coopération dans des domaines comme l’énergie, les engrais et l’agriculture existe déjà. À ce propos, Retno Marsudi a notamment fait mention, lors de son point-presse avec Nasser Bourita, des liens qu’est en train de tisser la holding PT Pupuk Indonesia, qui est actuellement le plus grand producteur d’engrais d’Asie du Sud-Est, avec le groupe OCP en vue de se fournir en potassium et en phosphate. De façon générale, le commerce bilatéral entre le Maroc et l’Indonésie a atteint, au cours de l’année 2022, 308,5 millions de dollars, ce qui constitue le plus grand volume observé au cours des cinq dernières années.
Mais il y a encore beaucoup à faire. Retno Marsudi, pour en rester à elle, a notamment ouvert la voie à une collaboration accrue entre le groupe pharmaceutique Biofarma, le plus grand fabriquant de vaccins d’Indonésie, et l’Institut Pasteur du Maroc. Le directeur de ce dernier, à savoir Abderrahmane Maaroufi, a, dans ce sens, été formellement invité à se rendre dans le pays d’Asie du Sud-Est.
Pour sa part, Nasser Bourita semble vouloir profiter de la tenue de la prochaine session de la commission mixte bilatérale, prévue au Maroc, pour le lancement d’un conseil d’affaires auquel participeraient des businessmen des deux pays. À cet égard, le chef de la diplomatie a exprimé le souhait que tout le temps nécessaire soit pris pour la préparation de l’événement, et surtout que celui-ci aboutisse à la signature de conventions. Du fait de la place qu’il occupe en Afrique, le Maroc pourrait ainsi, concrètement, servir de hub pour les entreprises indonésiennes.
Mais pour le Maroc aussi, le statut de puissance régionale de l’Indonésie semble susciter un intérêt certain. Au sein de l’ASEAN, Jakarta est susceptible de l’aider à faire avancer davantage ses pions, à un moment où la capitale indonésienne, où soit dit en passant se trouve le siège du secrétariat général de l’ASEAN, vient justement d’accueillir, le 1er décembre 2023, une réunion au cours de laquelle a été officiellement lancé le Comité de coopération sectorielle conjoint ASEAN-Maroc (AM-JSCC).
Sur le plan économique, la réunion avait notamment envisagé d’intensifier la coopération dans les domaines du commerce, des affaires et des investissements ; du partenariat public-privé ; du renforcement des micro-entreprises, petites et moyennes entreprises (MPME) ; de la construction de résilience face aux chocs futurs dans le secteur financier ; du tourisme durable ; des transports ; de l’énergie renouvelable et de la transition énergétique ; des technologies de l’information et de la communication ; des télécommunications ; de l’ingénierie aérospatiale ; de l’alimentation et de l’agriculture, y compris les pêcheries, l’aquaculture et la foresterie, incluant l’innovation verte et la production de nourriture halal ; de l’économie numérique ; de l’économie créative ; et de la science et de la technologie, incluant la recherche et l’innovation.
À noter aussi que depuis novembre 2022, l’Indonésie fait partie du G20. Un point que Nasser Bourita a également mis en avant au moment d’aborder la question de la coopération au sein des organisations internationales, auquel le nouveau mémorandum d’entente bilatéral donne par ailleurs la part belle.